Linz-Krems, se laisser glisser vers l’est

Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon coeur
D’une langueur
Monotone.

Paul Verlaine, Chanson d’automne

Quittant Linz sous la pluie, nous roulons droit devant nous, dans le matin qui s’étire.

Grein, bourgade longtemps inatteignable sans le Donaubrücke construit en 1967, a fondé son théâtre en 1791, année de mort de Mozart. Malheureusement pas visitable, à cette saison.

Bien fatigués après 65 km, nous regarderons les nuages se déchirer sur le paysage des Nibelungen, en buvant une bière aux portes du château qui s’enroule dans son écharpe d’arbustes rouges.

Sur la rive sud, nous ferons une halte à Ybbs, où Mozart en 1762 joué sur l’orgue de l’église St Lorenz, à moins que ce soit au couvent de franciscains, les version divergent….

Ce sera aussi l’occasion de visiter le musée des vélos – véritable moyen d’émancipation pour les femmes ! – et de tester la grande roue.

Melk et son immense abbaye baroque construite d’une seule pièce entre 1700 et 1740,(tellement grande qu’on ne peut la photographier en entier), la plus belle jamais vue, brille comme un joyau sous le soleil d’octobre. 

La muséographie respecte la fonction religieuse du lieu et nous traverserons le quart du bâtiment seulement, le reste étant réservé aux moines bénédictins et à la trentaine de classes du gymnase. Sacré lieu pour étudier !

La bibliothèque qui compte près de 100’000 volumes a inspiré Umberto Eco pour le Nom de la Rose et, sur les douze salles qu’elle occupe, nous n’en verrons que deux, avec quelques fac-similés fameux dont un extrait des Nibelungen.

Aux alentours, le jardin du Paradis et son pavillon oriental baroque offre un immense espace de méditation et de promenade dans la verdure et les herbes aromatiques.

Le Danube s’étire dans un paysage plutôt sauvage et les villes sont rares, ce qui explique que nos étapes sont longues.  Linz-Grein 60 km, Grein-Melk, 60 kilomètres, Melk-Krems, 48km et la fatigue se fait sentir car, en fait de descente, on a plutôt l’impression de rouler sur du faux plat, tant la pente est réduite. D’ailleurs, on se demande parfois dans quel sens coule le fleuve. A 22km/heure, je fournis un effort régulier, agréable mais assez physique et, le soir, je m’écrase de sommeil. Cela explique sans doute le manque d’inspiration pour ces dernières pages.

Sans compter que mon site a totalement buggé et, qu’ayant perdu les derniers articles depuis Munich, tout est en suspens. Heureusement, nous avons prévu un jour de repos à Krems et Etienne aura passé la journée à tenter de récupérer mes images et mes mots, disparus dans les limbes de l’internet.

La région de la Wachau qui s’étend sur trente kilomètres de Melk à Krems méritait un passage plus tranquille. L’occasion de grimper – à pied – sur les ruines du château de Aggstein accroché à son piton rocheux. Un labyrinthe d’échelles à la Escher font de ce site un jeu ou un site de mariage !

Possession d’un seigneur cruel qui laissait le choix à ses prisonniers de mourir de faim ou de se jeter dans le vide, et qui, du haut de la montagne, donnait l’ordre à ses vassaux restés en plaine d’attaquer les riches bateaux qui remontaient le Danube. Des histoires qui ont nourri ces Nibelungen dont on connait mal la partie autrichienne.

En cette fin octobre, l’orange et le jaune colorent encore le paysage. La région, protégée par l’UNESCO, au même titre que notre Lavaux, est recouverte de vignes, de cultures et de vergers. Des abricotiers surtout – ici tout est Marillen ! –  et les ouvriers s’affairent pour les vendanges tardives.

Port d’entrée ou de sortie de la Wachau, Krems a longtemps été la ville a plus prospère du Danube et les belles demeures alignées, les grandes églises et le monastère devenu musée en sont les témoins.

Ici c’est Beethoven qui est venu consulter un chirurgien et sa chaise est exposée.

Profitant du temps magnifique, Etienne est monté dans les collines pour se dérouiller les jambes.

Il nous reste deux étapes avant Vienne !